« Les citoyens n’ont rien à redouter de la nouvelle région » : un éclairage de René Souchon devant le Cercle Condorcet

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René Souchon et Pierre MieleLundi 5 octobre, le Cercle Condorcet de Clermont-Ferrand avait invité le président de la Région Auvergne, René Souchon, à donner son éclairage sur la réforme des régions, ses enjeux et conséquences pour les citoyens. C’est ce qu’il a fait sans langue de bois devant un public nombreux et très attentif.

S’il ne cache pas avoir souhaité une réforme territoriale différente et une région « Massif central » plutôt que l’union Auvergne-Rhône-Alpes -ce qui n’était plus possible puisque la partition des départements n’était pas envisagée-, il estime que la décision étant prise, il convient de préparer au mieux l’avenir de cette nouvelle région qui sera une très grande région française, la seconde après l’Ile de France, par ses 7,6 millions d’habitant et son poids économique.

Constituer des régions de plus grande taille, on en parlait depuis plus de dix ans, mais cela n’est pas suffisant pour atteindre le standard européen. Il regrette en effet la faiblesse des moyens financiers qu’auront à gérer les régions françaises au regard des régions allemandes ou espagnoles par exemple, qui limitera grandement leur capacité d’intervention ; il regrette également le maintien des départements et donc d’un partage des compétences certes redéfini mais toujours source de confusions ou de contradictions, au moment où se mettent en place l’intercommunalité et les métropoles.

Il décrit une à une les compétences des nouvelles régions, les avancées qu’elles permettront et parfois les limites. Ainsi les régions auront la compétence exclusive d’octroi des aides au développement économique, mais pas pour l’agriculture qui relèvera des départements  ; le tourisme pourtant secteur économique important sera une compétence partagée avec les communautés de communes, et la culture restera une compétence de toutes les strates territoriales.

En revanche, le schéma régional d’aménagement du territoire fera loi pour tous : réseaux de transports, réseaux numériques, foncier, environnement et développement durable, mobilité interurbaine et transports scolaires.

René Souchon se félicite du travail entrepris sans attendre par les deux présidents, leurs équipes et les deux administrations des actuelles régions : comparaison des modes de fonctionnement et harmonisation quand c’est nécessaire ; répartition des directions régionales  : par exemple, la direction de l’agriculture et de la forêt aura son siège à Clermont ; poursuite des projets spécifiques engagés, comme le déploiement du numérique en milieu rural pour lequel l’Auvergne est en avance. Il rappelle que les fonds européens sont « fléchés » et ne seront donc pas « fusionnés ».

L’Auvergne a des atouts nombreux qui seront valorisés et renforcés par la puissance de la nouvelle région, ce qui devrait renforcer le potentiel en matière d’emploi. Notre Université enfin réunifiée sera une grande université avec ses domaines d’excellence, comme le cancéropole. Les projets innovants, comme le quartier numérique de Clermont, seront bien sûr poursuivis.

Certains services de l’Etat en région pourraient souffrir de regroupements et donc de pertes d’emplois. Cependant, les rectorats ont été sauvegardés après une une intervention forte des deux présidents pour en défendre la nécessité.

Selon René Souchon, le risque de concentration n’est pas fondé pour ce qui concerne les services de la région, du moins en l’état des décisions actées par les deux parties. Aux interrogations sur l’éloignement des centres de décision et des services, ou sur la prise en compte de la ruralité, il répond que les technologies de communication modernes d’ores et déjà mises en œuvre, rendent inutile la concentration des administrations et des directions : les bureaux resteront répartis ; Clermont continuera d’abriter services et responsables ; il faut raisonner en termes d’antennes locales reliées et coordonnées.

Mais René Souchon reconnaît qu’une part des décisions et de leur mise en œuvre dépend des hommes et des femmes qui en auront la charge car c’est la qualité des élus qui fait l’essentiel et il convient donc de rester vigilant. Il préconise d’exiger en premier que les élus fassent leur travail d’élu, en principe à temps plein pour un élu régional, et de mettre fin une fois pour toutes au cumul des mandats.

Le Cercle Condorcet de Clermont remercie vivement le président René Souchon pour cet éclairage détaillé fort instructif et va poursuivre en interne ses travaux d’investigation sur ce thème, conformément à son objectif de vigilance citoyenne.

Germaine Tillion, une femme hors du commun

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Germaine_TillionC‘était le thème d’une conférence donnée au Cercle Pierre Mendes-France de Clermont mardi dernier par Claudine Lauby, historienne et secrétaire de l’association « Germaine Tillion, mémoire d’Allègre » créée dernièrement.
Claudine Lauby a retracé la vie, l’oeuvre et les engagements de cette ethnologue et grande résistante, née à Allègre, déportée à Ravensbrück, et qui mena ensuite un courageux combat pour la cause du peuple algérien dans les années difficiles qui précèdèrent l’indépendance de l’Algérie.
Des nombreux écrits de Germaine Tillion, nous retiendrons ces trois citations, qui résonnent encore si fort dans notre actualité :
« Il existe dans toutes les cultures une lumière intérieure »
« Ce n’est pas la misère qui provoque le fanatisme, mais le fanatisme qui provoque la misère puis qui l’entretient, et quand il n’y a plus d’espoir, on se tourne vers dieu… »
« Au terme de mon parcours, je me rends compte combien l’homme est fragile et malléable. Rien n’est jamais acquis. Notre devoir de vigilance doit être absolu. Le mal peut revenir à tout moment, il couve partout et nous devons agir au moment où il est encore temps d’empêcher le pire » (interview au N.Obs en 2007)
Germaine Tillion entrera au Panthéon le 27 mai prochain, en même temps que Genevièvre De Gaulle Anthonioz, Jean Zay et Pierre Brossolette. Voir à ce sujet le dossier-programme du Panthéon consacré à cette événement.

« La question de l’islam aujourd’hui en France », une conférence d’Abdenour Bidar

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Abdenour BidarQuelques membres de notre cercle ont suivi, avec intérêt, la conférence donnée par Abdennour Bidar  le 14 novembre 2014, à l’Ecole de droit de Clermont-Ferrand.
Philosophe spécialiste de l’islam, Abdennour Bidar est membre de l’Observatoire de la laïcité et chargé de mission auprès du Ministère de l’Education Nationale pour la pédagogie de la laïcité. Il a contribué à la rédaction de la « Charte de la laïcité ».

La présence massive et visible de l’islam conduit notre société toute entière à s’interroger sur elle-même et les musulmans à s’interroger sur eux-mêmes : tel est le point de départ de la réflexion proposée. Abdennour Bidar constate que la société française (et occidentale) est en crise et que le monde musulman est également en crise : de part et d’autre, les « valeurs » sont ébranlées et ne sont plus partagées ; le drame est que chacun voit en l’autre l’image de sa propre crise et l’accuse d’en être la cause.
Il faut sortir de cette logique d’accusation réciproque, admettre que chaque partie a un riche héritage à préserver, et s’interroger de part et d’autre sur les valeurs qui rassemblent vraiment encore aujourd’hui au sein du monde occidental comme au sein de l’islam, et celles qu’il serait possible de partager avec les autres. Autrement dit : quelle est la voie entre fidélité et mouvement ? ou encore, quelles sont les valeurs candidates à l’universalité ?
Concernant la « laïcité » à la française, il fait observer qu’elle ne fait pas consensus : c’est même devenu un instrument de division, « un nuage noir » ; d’où la nécessité de la Charte et des explications qu’il est redevenu indispensable de transmettre par l’école de la République.
Concernant l’islam, il fait observer qu’il n’est pas homogène dans le monde, que la colonisation a provoqué en son sein une « crise abyssale » (wahhabisme, salafisme, kemalisme…) et que les musulmans en France n’ont pas tous les mêmes compréhensions ni les mêmes degrés de pratique religieuse.
A partir d’exemples concrets, il montre que le « vivre ensemble » suppose que chacun ne conserve de ses traditions que ce qui est acceptable par l’autre, sans pour autant y renoncer à titre privé : c’est par exemple s’abstenir d’afficher en public son appartenance religieuse ; cela n’implique pas de renoncer à cette appartenance.
Il invite à puiser dans les histoires séculaires des uns et des autres et à « fabriquer du commun ».

En complément de ce résumé, on pourra lire lire ce texte magistral qui situe l’homme et sa pensée : « lettre ouverte au monde musulman »
http://blog.oratoiredulouvre.fr/2014/10/tres-profonde-lettre-ouverte-au-monde-musulman-du-philosophe-musulman-abdennour-bidar/ 

La laïcité en Europe

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La réunion nationale des présidents des Cercles Condorcet du samedi 25 avril a été consacrée, l’après-midi, à une conférence-débat sur le thème de la laïcité en Europe.
L’intervenante était Bérengère Massignon, docteure en sociologie de l’Ecole Pratique des Hautes Etudes, maître de conférences à sciences Po Paris. Elle est l’auteure, avec Virginie Riva, de L’Europe, avec ou sans Dieu ? Héritages et nouveaux défis (Les Éditions de l’Atelier, 2010). Le contenu de sa conférence reprend une note étoffée qu’elle a rédigé sur le thème « La Laïcité en Europe » sur le site de l’Institut Européen en Sciences des Religions : –>ici