Des retraites et des chiffres

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Pierre Miele, février 2023

Si, comme il semble, l’histoire se répète, une nouvelle réforme des retraites sera proposée en 2033, rapport du COR et chiffres à l’appui, pour reporter l’âge de départ, et cette fois sans doute à 67 ans !

En 2013, le Cercle Condorcet ouvrait un chantier de réflexion sur le thème « Informer et/ou manipuler »(1) et, dans le cadre de cette étude, une réforme des retraites en préparation avait servi d’illustration pour un procédé manipulatoire s’appuyant sur les chiffres.

Il s’agissait de la réforme pilotée par Marisol Touraine. Pour mémoire, François Hollande avait inscrit le retour de l’âge légal à 60 ans dans un programme qui lui valut son élection ; il allait revenir sur la réforme de 2010 qui repoussait cet âge légal de départ à 62 ans, et à 67 celui maxi de la retraite à taux plein. L’élection passée, il y revint ; mais pour maintenir les dispositions précédentes, allongement de l’espérance de vie oblige(2), et pour leur ajouter un allongement progressif de la période de cotisation que le gouvernement précédent n’avait pas réussi à faire passer.

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Démocratie ou élitocratie ?

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Pierre Miele, avril 2022

Sommes-nous encore en République ? Sans doute oui, mais encore faut-il préciser de quelle sorte de république il s’agit. Est-elle bien « démocratique » comme elle s’affirme et comme on aimerait le croire ?

La république est un système politique dans lequel la souveraineté appartient au peuple qui exerce le pouvoir politique directement ou par l’intermédiaire de représentants élus, peut-on lire sur Wikipedia, ce qui remonte à Platon. Cette souveraineté est censée garantir l’intérêt général. Mais la représentation du peuple peut prendre des formes diverses. Dans certaine « République populaire », la représentation du peuple est assurée par le Parti unique qui définit l’intérêt général et le pouvoir revient donc aux chefs du Parti qui gouvernent au bénéfice d’une oligarchie. En « République islamique », l’intérêt général est défini par la loi islamique et le pouvoir doit donc être assuré par les meilleurs serviteurs de cette loi qui gouvernent au service de leurs bienfaiteurs. En République française…

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Dossier Violence (3) – Violence vs non violence

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par Gilbert Cambe

« Une manière d’être et d’agir dans le conflit, qui respecte l’autre. […]
La non-violence, c’est se servir de la vie pour gagner, tandis que dans la violence tu menaces toujours l’autre de la mort, de sa mort
. » Jacques Sémelin – La non-violence expliquée à mes filles.

La non-violence, depuis les grandes campagnes de désobéissance civile de Gandhi, bénéficie d’un renouveau tant dans les principes que dans la pratique. Nombreux sont les auteurs et actions qui sont influencés par l’approche gandhienne, même si le mot non-violence n’est pas toujours prononcé.

Elle est d’abord pratique collective de lutte, avant d’être attitude fondamentale dans la vie individuelle, même si les deux sont souvent liés.  L’image de passivité rattachée souvent au terme de la non-violence ne résiste pas à la lecture des auteurs qui partent souvent précisément du conflit pour l’expliquer. La non-violence est aussi une philosophie qui délégitime la violence et promeut le respect de l’autre dans le conflit. La non-violence est en outre une stratégie d’action politique proactive et pacifique qui rejette l’utilisation de la violence dans la résolution des conflits. Elle est enfin un moyen de sensibiliser l’opinion publique qui contribue à exercer une contrainte sur l’adversaire pour l’amener à négocier.

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Dossier violence (2bis) : A propos de violences policières

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Pierre Miele, décembre 2020

Une mobilisation citoyenne contre la loi de sécurité globale peut être observée… Le refus de la violence des autorités est une tendance sociétale de fond qu’il n’est pas possible d’ignorer : celle de l’Etat, après celle du mari, du père, de l’enseignant, du prêtre… Les graves « bavures policières » de ces derniers temps ont renforcé cette mobilisation et l’hostilité de la population à l’égard de ce qui apparaît comme une nouvelle étape dans une dérive de la fonction policière avec  le recours à la violence.

Sûreté ou sécurité : de la confusion des buts

La Police est nécessaire à la république, comme le stipulent la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789  (article 12) : « La garantie des droits de l’homme et du citoyen nécessite une force publique ; cette force est donc instituée pour l’avantage de tous, et non pour l’utilité particulière de ceux à qui elle est confiée. » et la Déclaration universelle des droits de l’Homme (ONU, 1948, article 3) « Tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne. » La police républicaine a pour mission première d’assurer la sûreté, c’est-à-dire la protection des personnes pour le respect de leurs droits quand ceux-ci  sont menacés ; et non pas la sécurité comme protection a priori des biens des personnes ou des institutions. C’est bien la dérive qu’opèrent les politiques sécuritaires de ces dernières décennies (caméras de surveillance, contrôles d’identité, fichage, …, armes et armures anti-manifestants ).

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Dossier violence (2) – Ordre et justice, force et violence

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ou « Blaise au Far-West »

André Malvezin, décembre 2020

Si l’on veut observer l’évolution de la violence dans la construction des sociétés humaines, les exemples ne manquent pas. Il en est un bien connu et relativement récent : la création des Etats-Unis d’Amérique, des premiers conflits entre les tribus amérindiennes et les nouveaux arrivants en provenance d’Europe (1), jusqu’à la relégation, à la fin du 19ème siècle, des dernières tribus rebelles dans des réserves, après ce qu’on peut appeler un génocide. Passons sur la guerre d’Indépendance, l’esclavage des noirs, la guerre civile dite « de Sécession », une succession de violences majeures.

Ce qu’on appelle la « Conquête de l’Ouest » commence avec la ruée vers l’or en Californie en 1849 et continue en 1862 avec la colonisation des Grandes Plaines et la création de villes en un temps record, qui voient prospérer la criminalité et les structures pour la contenir. C’est surtout cette époque que décrivent la plupart des « westerns », genre cinématographique caractérisé par sa violence. L’intérêt de ces films ne se résume pas aux immenses troupeaux de bovins et de leurs garçons vachers (cow boys) aux chevauchées épiques. Il réside dans le témoignage de la création d’un pays, des différents Etats qui le composent et des villes naissantes. Ce sont de véritables documentaires (je précise que je parle là des westerns américains « classiques », de John Ford et compagnie, et non des westerns « spaghetti » qui n’en sont que la caricature et la dégénérescence). Le western américain, en général, est moins simpliste qu’on pourrait le croire et présente des situations souvent cornéliennes (conflits de devoirs et d’intérêts) et des personnages complexes (les héros ont fréquemment des failles intimes, des drames cachés). Ces subtilités apparaissent dans l’action et sont rarement verbalisées, contrairement au cinéma européen, français surtout (2), c’est pourquoi nous avons parfois du mal à les voir.

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